ET SI ON LIBÉRAIT LE TRAVAIL !
Est il possible de venir à bout du chômage ? Le fameux « plein emploi » est-il encore à notre portée ? Malgré les dispositions envisagées et prises par les gouvernants pour vaincre ce qui à en croire les débats est le mal du siècle, la quête parait de plus en plus vaine,
Au mois de mars 2016 nous comptions en France 10% chômeurs, selon Eurostat. Soit environs trois millions de chômeurs sur une population active d’environ 30 millions de personnes.
Comment sortir trois millions de personnes de la précarité du chômage et booster l’économie du pays ?
Car on l’a assez dit, des chômeurs, c’est des allocations chômages versées, et plus il y en a, moins ceux qui cotisent, c’est-à-dire ceux qui ont un emploi, peuvent supporter le coût.
Ce principe de solidarité qui veut que chaque travailleur mette dans un pot commun pour prévenir les périodes sans emploi de tous, fait partie des joyaux de ce qu’on appelle le modèle social Français. Son coté pervers c’est qu’à force de s’entendre dire que les chômeurs vivent aux frais de ceux qui travaillent, on finit par trouver ces derniers suspects, voir faignants.
L’impression qu’une partie importante ne se donne pas les moyens de trouver un emploi, que les entreprises ne sont pas aidées pour en créer bref, il faudrait Lâcher du lest pour les entreprises, serrer la vis pour les chômeurs, et tout ira mieux n’est-ce pas ?
Les choses nous semblent moins évidentes quand on y regarde de plus près ; Force est de constater que l’époque du plein emploi est bien révolue,
LES RAISONS DE LA GALÈRE !
Nous en sommes tous témoins, avec l’informatisation et l’automatisation le travail a cessé d’être la principale force productive. C’est-à-dire que globalement, dans un produit, il y a de moins en moins de temps passé par un humain pour le réaliser. Des taches jadis réalisées par des êtres humains sont faite aujourd’hui par des logiciels ou des robots, mieux et moins chers, plus rapidement. Autant dire qu’on ne reviendra pas en arrière.
De plus, il est rare, voire impossible de trouver une entreprise aujourd’hui qui ne fasse pas de l’optimisation, de la rationalisation, de la réduction de coûts, du lean management, du gain de productivité et j’en passe.
Toutes ces techniques, et concepts de managements qui visent à produire le plus et mieux avec le moins de ressources possibles, sont devenus avec le temps des moyens de supprimer de l’emploi et/ou dégager des bénéfices en un temps record. Chaque victoire obtenue par ces concepts représente des euros ou des dollars économisés et souvent, des emplois supprimés.
Les entreprises sont obligées d’adopter ces pratiques, car il faut conquérir toujours plus de part de marché, les arracher à la concurrence, qui fait de même de son coté, avec les mêmes armes et les mêmes outils.
Il faut donc aller toujours plus loin, scruter la chaîne de valeur de l’entreprise, trouver les économies à faire.
Nous vivons donc dans un système qui mécaniquement génère de la précarité et du chômage. Tout se passe comme si l’emploi lui-même était voué à disparaître. On estime qu’il ne représente plus que 15% du coût total de production. Les entreprises investissent des sommes colossales dans les équipements techniques qui devenant plus sophistiqués et plus efficaces sont devenus aussi plus chers.
Ce qui explique qu’à la sortie, le partage des fruits du travail c’est-à-dire les bénéfices, soient plus avantageux pour ceux qui ont contribués à acheter les équipements (actionnaires) que ceux qui y ont mis leur main d’œuvre (salariés).
Cette répartition inégale s’explique aussi du fait que, dans le postfordisme, ère dans laquelle nous sommes rentrés depuis les années 70, les investisseurs sont issues de la finance internationale, grosses banques d’investissements et autres business angels.
Ces derniers sont dans une autre dynamique que l’entrepreneur de la bourgeoisie locale ou de la banque coopérative de jadis. Ils sont dans une logique de profit à court termes, voir à très court termes, ce qui accélère et pervertit le besoin de rationalisation, d’optimisation, et de coupes franches dans les entreprises. Il faut que ça rapporte gros, en peu de temps.
Tout s’accélère donc, et comme tout bolide lancé à vive allure, ce système-là, ne supporte aucun obstacle. C’est pourquoi les états sont priés de réformer, d’enlever tous les gardes fous, tous les feux tricolores, d’avoir le moins de règle possible à respecter.
Sauf qu’il n’y as pas de ralentissement, ni même d’arrêt. C’est voué à s’accélérer encore plus, c’est le propre du système capitaliste ultra libéral, il n’y a pas de seuil où on se satisfasse et ou on considère qu’on peut se stabiliser. Chaque gain de productivité doit appeler d’autres gains de productivité, les objectifs de bénéfices, une fois atteints, sont déjà un vieux souvenir ! Le lendemain il faut faire le double…
AUGMENTER LE TEMPS DE TRAVAIL !
Nous l’avons vu, le système productif évolue vers un besoin de plus en plus réduit de main d’œuvre et on entend beaucoup de gens dire qu’il y a du chômage parce que nous ne travaillons pas assez et pas assez longtemps.
Mais Comment dans un système qui demande de moins en moins de travail veut on travailler plus ?
Certains pays pourtant, se portent bien mieux que la France en travaillant nettement moins, et réfléchissent à réduire encore le temps de travail pour créer de l’emploi et améliorer la productivité. Voir le cas de la suède
POURTANT D’AUTRES PAYS ON PU ATTEINDRE LE QUASI PLEIN EMPLOI !
L’Allemagne, les USA ont des taux de chômage aux alentours de de 4% n’est-ce pas une preuve qu’avec les réformes libérales on peut faire mieux ?
Avec des réformes libérales nous pourrons atteindre des taux de chômages plus bas, c’est sûr !
Mais la baisse du chômage en Allemagne as mis plus de personnes au travail tous en créant plus de précarité. Un rapport de 2015 le montre avec des chiffres étonnants ! L’Allemagne comptait en 2015, dix fois plus de pauvres que la France, pourtant le chômage y est inférieur de moitié. La faute aux renoncements que leur a coûté les réformes pour atteindre 4% de chômages, avec par exemple des contrats à 1€ de l’heure.
Les états unis quant à eux ont misé à la fin des années 2000 sur le pétrole de schiste pour sortir de la crise. Exploiter les gisements de pétroles par la fracturation hydraulique avec les risques que cela représente, tout en continuant la politique d’endettement infinie qui consiste à faire tourner la planche à billet. Voilà la formule qui permet aux états unie de maintenir le chômage en dessous de 5%.
Faut-il encore rappeler que les états unis sont ceux qui sont allé le plus loin dans le renoncement à un système social digne de ce nom ? Tout ou presque des services qui font généralement partie des missions régaliennes de l’état y sont privatisés ou réduit à leur strict minimum. De la santé, à la distribution de l’eau et de l’énergie. Ce qui fait que les US, toute première puissance du monde qu’elle est, nous renvoi régulièrement des images de pays du tiers monde.
Souvenez-vous de la ville de FLINT dans le Michigan qui a manqué d’eau potable pendant des semaines parce que la collectivité avait fait le choix de pomper l’eau dans une rivière locale gorgée de plomb, pour faire des économies. Souvenez-vous aussi des tensions communautaires qui ont lieu dans ce pays, qu’on peut sans problèmes lier à la précarité économique et sociale, voyez des villes qui lorsqu’elles ne font pas parties des centres de concentration de l’activité économiques, peuvent atteindre 40% de chômeurs.
TRAVAILLER POURQUOI ? PRODUIRE POUR QUEL BESOIN ?
Il se trouve que pour alimenter une machine qui va à une allure folle, on est obligé de faire des choses folles et vides de sens. Parce que l’objectif principal est de produire et consommer, les actions prises sont moins de donner aux gens un emploi décent, intéressant voir intelligible, que faire d’eux des travailleurs-consommateurs. Un peu comme si l’idéal de la démarche consiste à passer le plus claire de son temps à occuper un emploi quel qu’il soit, et l’autre partie à dépenser les revenus de cet emploi.
Dans cette logique, si nous ne produisons pas à outrance et sans aucune contrainte, nous n’aurons pas le plein emploi. Si nous ne consommons pas à outrance, ce que nous produisons ne trouvera pas de débouchés. Voilà le piège dans lequel nous sommes pris.
C’est pourquoi la production et la consommation n’as plus aucun lien avec nos vraies besoins.
C’est pourquoi nous épuisons les ressources naturelles, polluons largement plus que nécessaire et construisons notre prospérité sur la misère de l’autre.
PROGRÈS ECONOMIQUE CONTRE PROGRÈS HUMAIN ?
Au final, on peut se demander à quoi sert le progrès économique s’il ne sert pas le progrès humain.
Si en 2016, tous les progrès techniques que nous accumulons, toutes les innovations et les retombés économiques que génèrent l’activité des humain, ne servent pas à vivre mieux, moins pauvres, dans les meilleurs conditions, nous permettant d’explorer le plus de facette de nos vies, de donner une vraie place à l’accomplissement personnel, à quoi ça sert ?
L’économie à-t-elle encore un sens ?
Puisque la logique est seulement d’aller toujours plus loin toujours plus vite et gagner toujours plus gros.
Souvenons-nous que l’économie est cet « art magnifique dont la raison d’être est de gérer et de réguler les échanges et la répartition des ressources avec le minimum de dissipations et pour le bien de tous »(1), nous en sommes loin.
LIBÉRER LE TRAVAIL DE LA DICTATURE DE L’EMPLOI (2)
C’est sûr, l’emploi à tout prix serre toujours plus l’étau du cercle vicieux dans lequel nous sommes rentrés, surtout si c’est au prix d’acquis sociaux durement acquis, de garde-fou législatif permettant une certaine préservation de la dignité des humains qui font tourner l’économie, de la dégradation de l’environnement et l’épuisement des ressources.
Quand bien même nous acceptions toujours moins de réglementation et toujours plus de flexibilités, comme c’est tout le temps demandé, Il est fort probable qu’un système qui ne se satisfait jamais de ce qu’il a ne se satisfasse jamais des réformes et des concessions qu’on lui accorde.
Peut-être est-il temps de reconsidérer la question du travail dans nos sociétés, travaillons nous pour vivre mieux, ou vivions nous pour travailler ?
Et si l’une des alternatives était de mieux organiser le travail qui reste, pour que le plus grand nombre en ai un décent et intéressant avec un rémunération digne ?
Avoir un emploi rémunéré est-ce la seule façon de travailler ou de se rendre utiles à la communauté ?
Si beaucoup d’entre nous s’accomplissent réellement dans l’emploi qu’ils occupent et y voient la meilleure façon d’habiter le monde, beaucoup plus encore n’y trouvent pas le moyen de s’accomplir humainement, d’où l’importance que l’emploi laisse le temps de mener d’autres vies par ailleurs.
Nous avons besoin de temps et de sérénité pour porter des Projets associatifs, sportifs, artistiques, familiaux, spirituels, initiatiques, politiques, affectifs, etc… Cela si besoin, à côté du temps que nous vendons pour avoir de quoi subvenir à nos besoins. Ces projets sont aussi importants pour une société en bonne santé que le plus gros des PIB.
Ces projets représentent du travail, beaucoup de travail, des heures d’entrainement, de répétitions, de don de soi, d’implication, de conviction échafaudée et affirmées, de chemin parcouru, d’amour donné et reçu, qui n’est pas comptabilisé dans la richesse tel qu’elle est envisagée aujourd’hui.
Le plein emploi est alors loin d’être le garant du plein bien être, ou encore du plein bonheur !
ADAM SMITH : le travail est la substance commune à toutes les marchandises, une substance quantifiable et mesurable dont la qualité cristallisée dans le produit détermine sa valeur.
HEGEL : Le travail est la façon par laquelle les hommes (les êtres humains) inscrivent leur esprits dans la matière et par la même occasion transforment et produisent le monde.
Puissions-nous trouver un compromis juste entre ces deux visions, et libérer le travail de la dictature de l’emploi.
Pour Aller Plus Loin :
Pour préparer cet article, nous avons beaucoup puisé dans le travail de André Gorz, Ivan Illich et Pierre Rabhi.
Lire :
Métamorphose du travail -Andre Gorz -Filio-1988
Travail Fazntôme-Ivan Illich-seuil-1981
Vers la sobriété heureuse-Pierre Rabhi-2010
1- définition de l’économie issue du livre « vers la sobriété heureuse de pierre Rabhi »
2- formule de Frithjof bergmann- philosophe américain des années 50/60 qui a longtemps travaillé sur la question du travail
- Les définitions du travail par Adam Smith et Hegel sont issues du Livre « ecologica » d’André Gorz, page 135.
Publié le juin 27, 2016, dans - Introduction au développement durable, Economie, et tagué crise de l'emploi, crise du modèle libéral, donner du sens au travail, emploi précaire, emploi-marchandise, flexibilité du travail, flexisécurité, la faute aux 35 heures, le plein emploi, libérer le travail, loi travail, lutte contre le chômage, postfordisme, temps de travail, travailler moins, travailleur-consomateur, vivre mieux. Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.
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