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Finance Verte : Au Secours ! Wall Street Veut Sauver La Planète !
Imaginez que l’état Français ne dispose plus de moyens financiers pour préserver la beauté et la biodiversité du parc du Morvan, celui du Mercantour, ou encore le bassin d’Arcachon.
L’état, déjà endetté et faisant face à une baisse des recettes par l’impôt, confie la gestion de ces beaux lieux à une entreprise X.
Si X entretient et fait prospérer la faune et la flore au-delà d’un certain seuil, l’état lui verse de l’argent. Si c’est l’inverse, c’est l’entreprise X en question qui verse de l’argent à l’état pour réparer les dégâts.
Jusque-là, on se dit qu’on peut en discuter. Imaginez maintenant que l’entreprise X vous propose d’investir un peu de vos économies dans le projet. Elle fait cela pour lever des fonds qui vont lui permettre de prendre soins des parcs. Quand elle aura atteint le seuil qu’il faut pour être rémunéré par l’état, elle partagera la prime reçus avec vous.
Mais si elle ne parvient pas à atteindre le seuil, vous perdez votre mise.
Ceci est un exemple de ce que la finance appelle aujourd’hui « investissement vert ».
L’entreprise X est une société financière (banque, assurance…) vous être un actionnaire, et vos économies ont contribué à acheter des actions.
Ce sont les mécanismes comme ceux-là que les marchés financiers mettent en place pour protéger l’environnement.
LE MODEL DE LA FINANCE VERTE
Nous avons analysé dans un article sur lebilletdd les différents courants qu’on trouve dans le débat écologique aujourd’hui.
La croissance verte
La décroissance
La Post croissance
La finance verte s’inscrit dans le premier raisonnement, qui se développe sur l’idée que nous pouvons continuer à faire croitre nos économies comme nous l’avons toujours fait, en mettant simplement en place des mécanismes pour permettre la limitation du réchauffement climatique.
Partant du principe que les états vont être de plus en plus en difficulté face aux problèmes environnementaux, du fait également que les pays à l’échelle mondiale n’arrivent pas à s’entendre sur des règles communes pour limiter le réchauffement climatique (fiasco du sommet de Copenhague), les marchés financiers estiment qu’il faut donner une valeur monétaire à chaque élément constituant la nature, en faire un marché lucratif, afin qu’il y ai une contrepartie au fait de se soucier de la protection de l’environnement .
ECOLO OUI MAIS IL FAUT QUE CA RAPPORTE !
Depuis l’explosion de la bulle immobilière aux états unis, les détenteurs de capitaux sur les marchés financiers cherchent activement de nouveaux placements lucratifs à faire, le temps que le grand chambardement occasionné par la bulle immobilière se tasse.
Ils ont alors jeté leur dévolu sur la nature, arguant que si nous estimions le volume de chaque service que nous rend la nature, nous pourrons alors évaluer ce que vaut chacun de ces services, les quantifier et les certifier comme « services environnementaux ».
A partir de là, chacun de nous pourra acheter une part de ce service. C’est ainsi que le secteur privé tout entier, entreprises, fonds de pensions, individus, pourra financer par exemple le reboisement d’une forêt en Afrique, et l’activité économique générée par ce reboisement permettra de rémunérer les acteurs qui ont financé le projet.
Le hic c’est que La menace que représente la généralisation de ces systèmes de financiarisation de la nature est déjà en œuvre. En Ouganda par exemple, un projet de ce type à occasionné l’expulsion de millier de paysans qui cultivaient les sols ou le projet de reforestation avait été implanté.
On a du mal à comprendre la démarche vertueuse, si protéger la nature consiste à mettre des vies humaines en péril, on est plus dans l’écologie, dont l’objet est de maintenir un bien être humain sur la planète.
UN PRECEDENT
Ce n’est pas la première fois que les marchés financiers s’invitent dans le débat sur les moyens de répondre à l’impératif écologique qui s’impose à l’humanité.
L’autre initiative de ce genre est le système d’échange de quota d’émission(SEQE). Un système mit en place par l’union Européenne en 2005; à la base destiné à limiter la quantité de CO2 que peut emmètre une entreprise dans l’atmosphère.
Avec cette limitation, il y avait la possibilité d’acheter des droits à polluer à une entreprise qui n’avait pas atteint son quota. Le résultat 10 ans après est déplorable, les entreprises n’ont pas diminué leur taux de pollution, elles ont transformé le système SEQE en marché financier, ou on s’échange des droits à polluer, on achète des parts sans en avoir forcément besoin, on attend que les prix soient à la hausse pour les revendre bref, c’est devenu un marché spéculatif comme un autre.
PEUT-ON CONFIER LA BREBI AU LOUP ?
Sur le papier, on peut effectivement trouver du bon sens dans le fait de donner un prix à la biodiversité, cela pour pouvoir dresser une facture en bonne et due forme à ceux qui la détruisent.
On peut imaginer une finance éthique, qui sur la base d’une valeur donnée à un cours d’eau, va pouvoir imposer une contribution à une entreprise ou tout organisme qui pollue le dit cours d’eau, et ainsi éviter les dégâts que peut causer l’activité ou les réparer.
Les états se désengagent de plus en plus, alors oui, il faut trouver des moyens complémentaires pour financer la protection de la nature.
Mais avons-nous besoin d’en faire un instrument de rentabilité financière avec tout ce que cela implique ?
Et est-ce que les marchés financiers sont bien placés pour faire ce travail ?
Nous parlons de banques et autres établissements financiers dont la seule raison d’être est de faire de l’argent avec de l’argent, des institutions qui ont maintes fois prouvé que l’éthique et l’intérêt collectif ne font pas partie de leurs principales préoccupations.
Avec la crise financière de 2008, nous avons tous compris que des pans entiers de l’économie financiarisée échappent à toute régularisation. Nous savons que le marché financier bien souvent s’articule autour de l’enrichissement privé. Connaissant ces données :
Pouvons-nous confier le bien commun qu’est la nature aux banques ?
Pourquoi les banques se préoccuperaient elles de protection de l’environnement ?
Pourquoi les banques seraient plus vertueuses en se mettant à la finance verte ?
Sans afficher un militantisme débordant, ces questions viennent naturellement à l’esprit.
Il est important de s’en faire un avis personnel car les fonds qui irons demain financer ces mécanismes sont nos épargnes ordinaires, nos placements inter -entreprisses, SICAV, PEE et autres assurances vies.
FINANCE PRIVEE ET ECOLOGIQUE ?
Il est évident que pour faire face aux défis écologiques qui se présentent à nous, pour arriver à l’objectif de toute démarche écologique sérieuse, c’est-à-dire vivre mieux avec moins, il faut investir des sommes colossales dans les solutions que nous avons déjà et celles qui sont à venir.
De ce fait, nous avons besoin des capitaux privés, les états tous seuls ne pourront assurément pas faire face à tous les impératifs.
Il s’agit seulement de définir collectivement quel périmètre nous accordons à ces capitaux, en claire, ce qui peut être marchand et ce qui ne le sera jamais.
GREEN BOND
Le green bond ou « obligation verte » est un instrument financier à vocation écologique qui bien que largement perfectible est un début de réponse à l’utilisation de fond privés pour des projets écologiques.
Le green bond est un appel à financement, émis par des états, des entreprises, voir même des régions, pour financer un projet écologique. Ces projets peuvent être des parcs éoliens, photovoltaïques, ou des reconstructions d’usines et sites respectant les normes environnementales.
Ce sont donc bien des infrastructures, qui feront l’objet d’une exploitation dans l’économie réelle, dont les retombées permettront de rembourser les investisseurs moyennant bien sur un taux d’intérêt.
Il ne reste plus qu’as espérer que ces GREEN bond ne se transforment pas en produit financier de la nature à leur tour, et qu’ils fassent l’objet de beaucoup plus de sérieux dans la méthode d’évaluation des projets qu’il finance, ainsi qu’une réelle réglementation et surveillance.
EVITER D’OUVRIR LA BOITE DE PANDORE
La financiarisation de la nature à d’autant moins de sens qu’on peut se demander où cela s’arrêtera.
Si nous donnons un prix aux coraux, à telle ou telle espèce, et spéculons sur leur disparition ou leur survie pour nous enrichir, qu’est ce qui nous empêchera de spéculer sur nos propres enfants demain, sur la mort prochaine d’un parent ? A méditer.
POUR ALLER PLUS LOIN :
Green bond : article de Marc Antoine Franc sept 2014 dans le monde : financer la transition énergétique grâce aux green bond
Emission Square d’Arte disponible sur YouTube, thème : le réchauffement ça rapporte ?
Lire, Razmig Keucheyan : La nature est un champ de bataille, essai d’écologie politique. Paru en Mars 2014 Ed La découverte.
Article Bastamag : sur le système d’échange de quota d’émission de carbone
PERSONNALITÉS DU DÉVELOPPEMENT DURABLE #1
Nous commençons aujourd’hui une série d’articles qui mettront en avant à chaque fois une personnalité ayant contribué à faire exister et à sensibiliser sur les thèmes qui forment ce que nous appelons le développement durable. Nous essayerons aussi de mettre en exergue les sujets défendus par les personnalités à qui nous rendons honneur et leurs contextes actuels.
Nous avons choisis pour ce premier article une femme, scientifique, écrivain de talent et surtout amoureuse de la nature.
Mme RACHEL LOUISE CARSON était une savante Américaine, Biologiste de formation qui à commencé sa carrière au bureau des pêches de son pays, avant de se consacrer progressivement à l’écriture. S’en est suivi une carrière d’écrivain riche et couronnée de plusieurs succès. Le travail de la savante s’est ensuite tournée vers la protection de l’environnement et en particulier l’étude des effets des pesticides de synthèse sur la santé des hommes et la biodiversité.
C’est ce dernier travail qui à donné un livre publié en 1962, sous le titre de « silent spring » soit printemps silencieux en français.
A une époque ou les pesticides étaient porteurs de meilleurs lendemains, ou les enfants étaient aspergés de DDT pour quelques problèmes de poux ou d’hygiène, ce livre posait la question du risque encouru et des conséquences sur le long terme de l’utilisation frénétique de ces produits de synthèse.
Le fait que les pesticides soient mis entre les mains de personnes ne connaissant pas les règles élémentaires de leur utilisation, les résultats des études montrant l’impact qu’avait et qu’on encore ces produits sur la biodiversité y compris l’organisme des êtres humains constamment en contact avec eux, était les sujets principaux de son œuvre.
Mal lui en as pris car l’industrie chimique s’est alors lancé dans des attaques les plus odieuses pour discréditer la scientifique et ses thèses.
Il à fallu que Mme CARSON savante discrète, se prête au jeu de la jouxte médiatique pour marteler son opinion et déconstruire les fantasmes que les lobbys de l’industrie de la chimie entretenaient autour de sa personne.
Bien que de plus en plus discréditée par le corps scientifique la savante gagna la bataille de l’opinion public, son livre profitant paradoxalement de la mauvaise presse qu’on lui faisait devint un best seller et les citoyens américains, sensibilisés se mirent à demander des comptes, à manifester pour que la lumière soit faite sur les éventuels effets secondaires des pesticides qu’on présentait comme de merveilleux remèdes !
Sous la pression populaire, les autorités américaines finirent par reconnaître que les thèses soutenues par Mme CARSON étaient justifiées et pour la première fois dans le monde, on légiféra pour réglementer l’utilisation des produits chimiques, prévenir leur impact sur les êtres humains et l’environnement en 1966. Malheureusement, Mme CARSON ne sera pas la pour apprécier l’aboutissement de son travail, car décédée deux ans plutôt de suite d’un cancer.
En 1970 dans le même lancée « L’environmental protection agency », l’agence de la protection de l’environnement américain vit le jour et le mouvement écologiste naissant connu un réel essor.
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PIONNIÈRE DE LA NOTION DE PRINCIPE DE PRÉCAUTION
Au-delà de la lutte pour la réglementation des pesticides, Mme CARSON à planté le jalon d’un principe qui aujourd’hui même s’il fait débat, est pris en compte dans de nombreux textes officiels nationaux et internationaux, le principe de précaution.
Le principe de précaution est l’un des principes fondateurs du développement durable. Il est motivé par la nécessité d’agir avec prudence quant à l’utilisation que l’on fait du progrès technique ou scientifique, tant que l’on n’as pas de certitude sur l’impact de ces derniers sur les êtres humains et la nature.
Un principe qui est devenu la règle dans certains pays dont la France, suite à de nombreux scandales comme celui du sang contaminé ou des inquiétudes soulevées par les innovations scientifiques récentes, notamment les OGM.
La charte de l’environnement, texte constitutionnel adopté en 2004 sous le gouvernement RAFFARIN 3 repose sur trois grands principes dont celui de précaution. Les deux autres sont : le principe de prévention et le principe pollueur payeur.
L’article 5 de cette charte dit : « Lorsque la réalisation d’un dommage pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent par l’application du principe de précaution, à l’adoption de mesures afin d’éviter la réalisation du dommage ».
Concrètement, ce concept tente de mettre l’homme et l’environnement au centre de la démarche de progrès, pour ne pas que ce dernier ne soit porté que par la course toujours plus vive au profit.
Comme disait un expert sur la question, « Le principe de précaution c’est le temps de l’évaluation, le minimum de sagesse entre la découverte scientifique et la décision politique ».
Le principe de précaution pose beaucoup de questions, notamment celle des effets supposés néfastes de ce dernier sur la recherche et l’innovation. Les chercheurs et scientifiques seraient donc limités dans leur travail par ce principe, ce qui priverait l’humanité de techniques et savoirs pouvant améliorer leur ordinaire.
Depuis la médiatisation des possibles cas de nuisances causés par les antennes relais téléphoniques, on à vu des décisions juridiques imposant le démantèlement d’antennes, basé sur le principe de précaution, d’autres modérer voir vider ce principe de tout son sens. Les critiques ce sont accrues et sont devenus plus violentes, remettant constamment en question cette idée.
Le débat est donc toujours ouvert et continu d’opposer les pour aux contres.
N’empêche, il est une évidence que personne ne peut nier. Aucun scientifique ne peut affirmer savoir au moment ou il fait une découverte tous les effets négatifs que son application aura sur l’environnement d’application. La science elle-même est encore couverte de nombreuses zones d’ombres pour les êtres humains.
Le principe de précaution semble donc relever du bon sens élémentaire, si nous souhaitons évoluer dans nos rapports avec le progrès, prendre le temps de l’analyse afin de savoir si l’intérêt immédiat évident ne cache pas des catastrophes futurs.
Nous devons ce principe élémentaire à Madame RACHEL CARSON, à qui cet article rend honneur.
Aller plus loin sur le sujet :
Charte de l’environnement 2004
Le printemps silencieux de RACHEL CARSON
Documentaire : ces catastrophes qui ont changèrent le monde